Billet de la Présidente et des gestionnaires – Janvier 2025

L’ANNÉE 2024 EN RÉSUMÉ

2024 a été une année marquée par la performance exceptionnelle des actions tirées vers le haut par le marché américain. La différence de performance entre ce dernier et les autres marchés a engendré une forme de concentration de la performance, comparable à celle de 2023. Cela a pesé sur les portefeuilles affichant une diversification géographique trop prononcée, une tendance observée depuis la fin de la pandémie. Cette concentration des performances est intervenue à tous les étages : les actions ont surperformé les obligations, les actions américaines ont surperformé celles du reste du monde et moins d’une dizaine d’actions américaines ont surperformé le reste du marché local. Au-delà de ce constat, deux autres tendances majeures ont dessiné en 2024 les performances des principaux marchés. Premièrement, le ralentissement qui a affecté l’économie mondiale, à l’exception notable des États-Unis : le monde a ralenti en 2024, mais la croissance américaine a su rester solide. Deuxièmement, la désinflation lente mais bien réelle qui a permis aux banques centrales de baisser leurs taux directeurs en seconde partie d’année. Pour tenter de comprendre ce qui pourrait changer en 2025, il est nécessaire d’analyser ces trois tendances (concentration, ralentissement et baisses de taux) pour en comprendre les fondamentaux et répondre à cette question essentielle : lesquelles prendront fin en 2025 et lesquelles se poursuivront une année encore ?

La mécanique habituelle de la désinflation est généralement la suivante : lorsqu’il y a un choc d’inflation, les banques centrales augmentent les taux courts pour faire monter les taux longs. Cela a deux buts principaux : décourager l’investissement des ménages et des entreprises d’une part, puis diminuer l’attractivité des actions vis-à-vis des obligations d’autre part, pesant pour finir sur la consommation. L’investissement privé aux États-Unis n’a augmenté que de 0.1% en 2023 et de 4.3% en 2024, contre une moyenne historique de 9% de 2005 à 2023. En zone Euro, l’effet est encore plus marqué avec un investissement en progression de 0.7% en 2023 et une contraction de -2.2% en 2024. De ce point de vue, la cible des grandes banques centrales a été atteinte. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : côté consommation – le second effet – la situation des États-Unis est bien différente de celle qu’a connu la zone Euro : la consommation américaine a ainsi augmenté de 2.5% en 2023 et de 3.7% en 2024, contre une moyenne avoisinant les 2% entre 2009 et 2019. En zone Euro, la consommation n’a augmenté que de 0.5% en 2023 et de 0.9% en 2024. Il est essentiel de bien comprendre ce point pour saisir pourquoi la BCE a finalement été la première banque centrale, après la BNS, à baisser ses taux. La banque centrale américaine a eu besoin de davantage de temps avant de délivrer sa première baisse, la consommation américaine peinant à refluer et continuant à attiser l’inflation.

Une des différences majeures entre la zone Euro et les États-Unis tient au fait que le Trésor américain s’est autorisé à protéger l’économie en stimulant la consommation. On observe ainsi un déficit primaire de -6.3% en 2023 et de -6.5% en 2024 aux États-Unis, des chiffres astronomiques pour des périodes économiques ne présentant pas de récession. La consommation américaine a ainsi joué un rôle de bouclier, protégeant l’économie et y limitant le reflux de l’inflation Pour comparaison, alors que la situation européenne était plus compliquée tant en termes d’investissement que de consommation, le déficit primaire n’a atteint « que » 3.6% en 2023 et 3.1% en 2024. Rappelons qu’en 2023, 88% des économies de la planète ont vu leur croissance se détériorer. Ce chiffre ne s’est élevé en 2024 qu’à 73% : les deux dernières années ont été des années de ralentissement global, hors États-Unis. On comprend alors pourquoi les performances ont été tirées par les actifs américains : en plus de l’attractivité sectorielle des entreprises américaines, le dynamisme relatif de cette économie a su attirer les flux financiers.

Les performances des marchés ne sont que les conséquences de ce scénario de dominance de l’économie américaine dopée au déficit public : les actions Monde gagnent +17% (MSCI World, en dollar), tirées par les actions américaines (S&P500 +23.3%) et les actions dites de croissance (MSCI World Growth +25%). Les performances des autres actifs sont ainsi moins alléchantes : les actions Émergentes ne progressent que de 5%, alors que les actions à valorisation faible (MSCI World Value) ne gagnent « que » 9%. Les actions Européennes quant à elles gagnent un peu moins de 10%. Enfin, les relents d’inflation américaine ont pesé sur la performance obligataire : l’inflation a reflué plus lentement aux États-Unis, signe que la croissance y était plus résiliente que prévu. Les taux américains à 10 ans sont ainsi monté de 70 points de base (pdb). Leur équivalent allemand progressait dans un même temps de 52 pdb, témoignant une fois de plus de l’influence mondiale de la politique monétaire américaine. Le dollar US en a bénéficié et gagne un peu plus de 7%. Les matières premières sont restées stable sur la période, la baisse des prix de l’énergie compensant la forte progression des prix de l’or de près de 27%.

2025 : PERSPECTIVES

On le comprend aisément, l’une des raisons qui explique la concentration des performances en 2024 tient à la politique budgétaire exceptionnelle menée par les États-Unis en particulier. Partout ailleurs, on a vu le ralentissement piloté par nos banquiers centraux se matérialiser et peser sur les marchés actions domestiques. Pour que cette tendance change, deux facteurs sont donc nécessaires : d’une part, que les banques centrales poursuivent la baisse de leurs taux directeurs, processus globalement déjà bien engagé. Une fois ces taux ramenés à un niveau neutre (autour de 2%) ou en-deçà, le monde sera capable de connaître une phase de reprise. Le second facteur tient bien évidemment à la politique budgétaire globale et plus particulièrement à celle menée par le Trésor américain. Il est nécessaire que l’économie américaine ralentisse pour que la Fed puisse desserrer l’étreinte qu’elle exerce sur l’économie américaine. Si la stimulation de l’économie américaine par des déficits abyssaux se poursuit, il semble difficile de voir ce ralentissement se matérialiser. En l’absence de celui-ci, les taux américains ne baisseront pas et le dollar restera fort, pesant sur l’ensemble des classes d’actifs en dehors des actions américaines : une première étape de consolidation fiscale est une condition nécessaire pour que les États-Unis puissent connaître un ralentissement, entraînant la baisse du dollar et des taux. Cette étape est une condition sine qua non pour observer des performances positives et plus homogènes, à la fois entre actions et obligations ainsi qu’au sein des différents secteurs et des différentes régions.

Ce scénario central vient naturellement avec des alternatives potentielles : un premier scénario qui verrait en 2025 la répétition de 2023 et 2024, avec une concentration forte des performances. Il suffit pour cela que le Trésor américain poursuive sa politique budgétaire. Un second scénario alternatif tiendrait compte d’effets collatéraux des mesures annoncées par l’administration Trump. Si nombre de ces mesures semblent positives pour la croissance américaine, et par extension pour la croissance mondiale, la question des tarifs pourrait bien être la source d’un choc de croissance négatif pour l’économie mondiale tout entière. Ces mesures visent à rebattre les cartes des échanges mondiaux au profit des États-Unis : si elles étaient la source d’une inflation temporaire aux États-Unis, elles pourraient bien aussi générer un ralentissement de la croissance mondiale. On l’a observé en 2018, avec le premier volet de ces mesures, essentiellement destinées à la Chine. Appliquées sans demi-mesure, ces barrières tarifaires pourraient ainsi passer d’inflationnistes à récessionnistes, pesant sur les perspectives de profits mondiaux, et par conséquent sur la valorisation des actions mondiales. Ce faisant, elles pourraient faire le jeu des obligations qui retrouveraient leur rôle de diversification dans les portefeuilles multi-actifs.

ÉVOLUTION DES VALEURS DE PARTS

Dans ces conditions financières et macro-économiques complexes, les portefeuilles ont enregistré des performances solides sur l’année 2024.

Segment A (en EUR) :

La mise en œuvre de la gestion pour le segment A est diversifiée, avec d’une part une gestion active (vise à terme à surperformer, avec un risque contrôlé, le benchmark du mandat), d’autre part une gestion basée sur un budget de risque (recherche de contrôle des risques tout en assurant un rendement). Le portefeuille est exposé aux fluctuations à court terme des marchés financiers, tant à la hausse qu’à la baisse, mais de manière contrôlée grâce à une gestion active et une forte diversification.

Ce portefeuille a bénéficié de la hausse des marchés et voit, à fin décembre 2024, sa valorisation passer de EUR 274.28 à 293.48 soit une performance en EUR de +7.0%.

Segment B (en EUR) :

La mise en œuvre de la gestion du segment B est focalisée sur la préservation du capital, alliant placements monétaires et gestion diversifiée conservatrice à primauté des risques. Il avait joué son rôle de préservation du capital en 2023, en comparaison avec des portefeuilles conservateurs traditionnels.

La valeur de part du segment B est passée de EUR 161.60 à 168.14, soit une performance en EUR de +4.05%.

Segment C (en CHF) :

La mise en œuvre de la gestion du segment C est comparable au segment A, avec des risques similaires, mais gérée en franc suisse. L’appréciation solide du franc suisse a engendré des gains moins prononcés.

La valeur de part du segment C est passée de CHF 118.48 à 124.35, soit une performance en CHF de +4.95.%.

Anne-Marie Arbaji-Sfeir
Présidente ad intérim du Conseil de Fondation